Potosi sera notre première étape en Bolivie, nous étions en entrés dans le pays par le Sud Lipez et le Salard d’Uyuni. Et à Potosi, tout est “le plus haut du monde” : la ville est perchée à plus de 4000 mètres d’altitude, ce qui est fait “la ville de plus de 100 000 habitants la plus haute au monde” (elle bat même Lassa, au Tibet !), elle possède “le terrain de foot le plus haut du monde”, “la brasserie la plus haute du monde”, etc…Ca finit par en devenir lassant…
Et alors que les Boliviens se promènent ici « comme si de rien n’était », pour les voyageurs que nous sommes, remonter toute rue légèrement en pente s’apparente à un petit exploit sportif.
Le 15 Mai, comme nous sommes arrivés la veille du Salar, épuisés par notre dernière semaine passée à nous lever dans la nuit ou nous coucher tard pour crapahuter à plus de 4000 mètres dans l’altiplano, on décide de la jouer “très calme”. Nous logeons à l’hostal Eucalyptus, bien situé dans une rue en pente (Calle Linares) menant directement au coeur de Potosi, la Plaza 10 de Noviembre. Mais on l’a surtout choisi “parce qu’il a le chauffage”. Et ce matin, on en profite…
Ce n’est que parce que l’heure du petit déjeuner touche à sa fin que l’on daigne passer à la verticale. Tiens, il y a du “mate de coca” (infusion à base de feuille de coca). J’ai découvert cette boisson dans le Salar. J’adore le petit goût un peu fumé, un peu sucré, de la coca, et ça aide à lutter contre le mal d’altitude. La coca est totalement légale en Bolivie, et fait même partie de la culture locale. Pas quand elle a été transformée en drogue, mais juste en infusions, bonbons, ou en feuilles qu’on met dans la bouche et qu’on “chique”. Le meilleur remède contre “El Sorroche” paraît-il, mais à l’effet excitant, comme le café, à proscrire le soir… (Et là je comprends que le chauffeur de taxi de la veille n’avait pas de rage de dent mais une énorme boule de feuilles de coca dans la bouche !)
Après le petit déjeuner, direction la terrasse : notre hôtel dispose d’un joli roof-top qui nous permet de découvrir pour la première fois la ville. On apprécie ses couleurs ocres entre murs en adobe et toits de tuiles, les tours des édifices religieux qui percent les rues du centre, et surtout le “Cerro Rico” (la montagne riche – 4782 mètres), imposant, massif, menaçant (?) qui domine la ville.
L’idée que nous nous faisons de Potosi était uniquement celle des mines, et voilà que nous en découvrons une image chatoyante. Moi qui ne voulais pas m’y arrêter (enfin, si, une nuit “pour nous remettre du Salar”, mais c’est tout), je perçois déjà que c’était une erreur.


La matinée passe tranquillement. Nous profitons des rayons du soleil qui commencent à réchauffer l’atmosphère et Eden fait un peu de leçons…A midi, c’est la faim qui nous pousse dehors. Nous descendons jusqu’à la Plaza del 10 de Noviembre, superbe, de style colonial, avec son beau jardin central, ses bancs, sa cathédrale et ses magnifiques bâtiments de l’époque Espagnole. Nous visiterons plus tard : nous avons repéré un restaurant, et après le salar, on a bien droit à un peu de “luxe” : nous déjeunons à El Tenedor de la plata (la fourchette d’argent). Meubles de bois sombre, service impeccable…. ambiance feutrée. Pas de touristes ici, plutôt des notables de la ville qui viennent y prendre leur déjeuner. Nous nous régalons à prix doux. La Bolivie est bon marché, ça va faire du bien à notre budget, après le Chili…
En sortant, nous flânons un peu sur la plaza del 10 de Noviembre, entre les enfants en uniforme et les vendeuses de “choclo” (espèce de pop corn géant, bienvenus au paradis du maïs !) qui refusent catégoriquement de se faire tirer le portrait. Ha oui, beaucoup de Boliviens croient que tu leur voles leur âme en prenant une photo…



Nous nous dirigeons bientôt vers la Casa de la Moneda, toute proche. Génial, il y a des visites guidées en Français. Nous nous joignons à un petit couple de jeunes français, et c’est parti pour une visite des plus captivantes, plongeant dans l’histoire de Potosi.

La ville est en effet classée Patrimoine mondial de l’Unesco depuis 1987 pour ses superbes bâtiments coloniaux témoins de son (très) riche passé. En effet, quand ils arrivèrent ici au XVIeme siècle, les Espagnols découvrirent que le Cerro Rico était en fait le plus gros gisement d’argent au monde ! Et ils ne se privèrent pas de l’exploiter (contrairement aux Incas, passés par là juste avant, qui eux avaient fui, suite à une épidémie, qu’ils pensaient déclenchée par la colère des dieux de la montagne. Ils avaient donc décidé, peut être sagement, de “laisser la montagne tranquille”.
Et sans un Indien à la langue trop pendue qui révéla le secret de la montagne aux Espagnols, le monde aurait peut-être été différent ?
C’est l’exploitation de ces mines, dans les conditions effroyables qu’on nous décrit cet après-midi, qui firent la richesse de l’Espagne et même des Hollandais, Britanniques et Français, qui se voyaient payer toutes leurs marchandises “cash” par les Espagnols. Ainsi les tonnes d’argent sorties du Cerro permirent de développer le commerce international. C’est ici qu’est né le libéralisme, et Potosi fut bientôt connue jusqu’en Asie !
Quelques exemples : La ville fut la seule d’Amérique Latine à recevoir le rang de “Ville Impériale” (par Charles Quint). Aux heures les plus fastes, elle comptait 165 000 habitants (autant qu’aujourd’hui à peu près), soit plus que Londres ou Paris à l’époque, et incarnait à elle seule la richesse. D’où l’expression “C’est le Pérou” d’ailleurs (à l’époque la Bolivie et le Pérou ne faisaient qu’un).
Fin XVIème, début XVIIeme siècle, on a pu extraire jusqu’à 240 tonnes d’argent par an, pour la Couronne Espagnole (c’était vraiment “le Pérou”, effectivement !).
Nous sommes donc dans la nouvelle Casa de la Moneda, bâtie au XVIIIème siècle, l’endroit où l’on battit monnaie jusqu’en 1951 ! Sur la plaza del 10 de Noviembre, nous sommes passés devant l’ancienne Casa de la moneda, mais au regard du volume d’argent extrait, le bâtiment s’était vite révélé trop petit. D’où le bâtiment où nous sommes, bien plus vaste.
Et après avoir traversé la cour centrale et monté un petit escalier, nous pénétrons dans un ancien entrepôt dont le parquet est encore d’origine. Ici l’on voit l’évolution de la fabrication des pièces de monnaie. Notre guide nous explique les 4 grandes périodes, mais c’est surtout la première, lorsque les pièces, en argent quasi pur, étaient frappées au marteau qui nous interpelle ! Et puis nous apprenons l’origine du sigle dollar $ : Toutes les pièces frappées comprenaient 4 lettres de la ville superposées (PTSI pour Potosi, ce qui ressemblait fortement au sigle actuel $). On sortira d’ici moins bêtes, c’est sûr !

En redescendant, on y découvre de grandes roues, sorte de “moulins” tirés par des chevaux (ou des hommes ?) puis nous passons dans d’autres pièces encore, aux machines plus modernes.

Un peu plus loin, la fonderie (dans l’ancienne vraie fonderie), où a été reconstitué le travail de l’époque. Au delà de découvrir comment l’argent était séparé du minerai, on y apprend comment des millions d’Indiens sont morts dans les mines, des conditions de travail et de vie atroces, mais aussi des maladies rapportées par les blancs. Des esclaves ? Pas “vraiment” : les Espagnols s’étaient inspiré du système Inca et pratiquaient la “mita” (le travail obligatoire, jusque 18H par jour !). Pourquoi avoir employé plus particulièrement des Indiens et pas des esclaves Africains ? He bien parce que ces derniers ne supportaient pas le climat et l’altitude de Potosi ! Alors les Espagnols les revendirent à la Colombie et au Brésil… Quand l’homme est un loup pour l’homme…


Nous poursuivons notre visite dans d’autres pièces… après les horreurs des conditions humaines, nous passions à la beauté des pièces en métal argenté qu’on a pu produire ici, où tous les délires étaient permis… jusqu’à cette incroyable selle de cheval, 100% argent pur !


Puis vient la pièce des minerais, une petite chapelle et ses momies de bébés, et surtout la pinacothèque.


Première introduction pour nous à l’art religieux Sud Américain colonial, et forcément, à l’école de Potosi. On y découvre diverses Vierges mêlant Christianisme et Trinité Inca : Terre, Lune, Soleil. La plus célèbre est “La Virgen del Cerro” (la vierge de la montagne), dont la robe représente le Cerro Rico. Quand la Pachamama (la Terre Mère, divinité Andine) et Marie se confondent…

Fin de la visite. Ca y est, on est “brieffés”.
Eden se fait frapper une pièce de monnaie “à l’ancienne” par son père. En alu…un peu moins chic, après toutes ces histoires d’argent….
Ce soir nous retrouvons Alisson et Adrien, nos jeunes copains de San Pedro de Atacama, pour un petit “mate de coca” au Café de la Plata (en face du Tenedor de la Plata :-)), une institution pour les touristes à Potosi.

Retour à l’hotel où on se fait à diner rapidement. Et dodo dans notre chambre CHAUFFEE ! Bonheur…
Le 16 Mai, nous avons rendez-vous avec Willy, le patron de l’agence Marco Polo pour visiter les mines. Objectivement, j’ai longuement hésité à accepter de les visiter, ces mines. On sait que les conditions de travail des mineurs y sont parmi les plus difficiles au monde, et la mine a la réputation d’encore employer des enfants…Voir la misère au travail n’est pas “mon kiff”. Je trouve que c’est du voyeurisme et c’est tout ce que je déteste. Quelle rencontre et quel partage attendre à croiser ces forçats du fond ? …Et puis descendre là dedans avec Eden ? C’est d’ailleurs bien pour cela que je ne voulais pas m’arrêter, ou le moins longtemps possible, à Potosi.
Mais après la visite de la Casa de la Moneda hier, Geoffrey a réussi à me convaincre. Surtout qu’il m’a proposé de faire la visite avec Willy, qu’on a pu rencontrer la veille. Ancien mineur lui-même, il sait de quoi il parle, prend des tout petits groupes, a un garçon du même âge qu’Eden, et en plus parle français, ce qui facilitera la communication avec notre fille.
Nous sommes une fois de plus avec un autre petite couple de Français.
La première étape avant la mine : s’équiper. Willy nous amène dans un garage où il stocke combinaisons, bottes en caoutchouc, casques et frontales. On essaie. Alors, forcément, pour Eden, la taille n’est pas idéale. Surtout les bottes. Du 38 quand elle fait du 34…Allez, ça ira quand même…Lève bien les talons ma puce quand tu marches 🙂
Seconde étape : l’arrêt obligatoire au marché des mineurs. C’est ici que les mineurs viennent s’approvisionner en cigarettes, feuilles de coca, alcool (à 96 degrés !!), soda, mais aussi dynamite, nitrate d’ammonium, gants, bottes, masques.. Willy nous explique que les mineurs doivent tout payer eux-même. Ce sont des travailleurs indépendants, organisés en petites coopératives et payés au rendement. Mais ils doivent déduire de leur solde ensuite tout ce dont ils ont besoin pour la mine…Alors comme on vient les voir, on va leur faire “un petit cadeau” chacun. Je refuse d’acheter de l’alcool à 96 degrés et de la dynamique quand même…


Puis nous partons vers le Cerro Rico, traversant des quartiers populaires, qui n’ont rien à voir avec les jolies rues proprettes du centre colonial. On retrouve bien le clivage historique de la ville, avec d’un côté les riches Espagnols avec leurs balcons, leurs églises et bâtiments sculptés, et de l’autre les mineurs…
Car si Potosi vit aujourd’hui “un peu” du tourisme, ne nous leurrons pas, c’est bien la mine son “poumon” (très mauvais jeu de mot) économique depuis toujours.
On y meurt de silicose à de père en fils depuis toujours la quarantaine à peine dépassée…Mais on y met ses fils au travail dès qu’ils ont dépassé la dizaine. (15 ou 16 ans selon Willy mais on a un doute malgré son discours).
Les mineurs y gagnent en général plus que le salaire moyen bolivien, mais leurs revenus dépendent du cours des métaux, et de leur expérience. Lors de notre passage, 17 000 mineurs travaillaient au fond, mais les cours s’étaient effondrés, et les plus jeunes, ceux qui poussent les brouettes, ne gagnaient que 800 pesos (soit à peine plus de 100 euros) / mois. Les mieux payés, eux, gagnaient le double… pas vraiment une fortune pour faire des sprints dans la mine une fois qu’ils ont allumé leurs bâtons de dynamite (ils ont 30 secondes pour faire 85 mètres !). Willy nous montre des mineurs au loin, en grande discussion à l’air libre. Des dynamiteurs. Ceux-là peuvent travailler jusque 24H d’affilée pour gagner plus.
On apprend par Willy l’organisation dans la mine, les coopératives, le manque d’air, la chaleur qui peut atteindre 35 degrés au fond…

Le Cerro Rico est un vrai gruyère, « on pense » qu’il y a 200 mines dedans, pouvant descendre jusque 500 mètres au dessous de la roche, mais aucun plan des tunnels n’existe, ce qui rend toute percée particulièrement dangereuse, et fragilise la montagne. D’ailleurs son sommet s’est affaissé…
On est bien inquiets au moment de pénétrer dans le tunnel qui nous attend…mais Willy nous rassure : “Rien de dangereux” pour nous aujourd’hui. Il nous indique par ailleurs que si on ne se sent pas bien, on fera immédiatement demi-tour. Pas si rassurant que ça… mais bon, on y va.


Je sais Eden un peu claustrophobe, et moi…sans mettre de nom sur mon ressenti à pénétrer dans le noir d’un boyau sans fin, je ne suis pas très rassurée. Mais peu à peu, je m’apaise…et Eden a l’air de bien suivre aussi. On s’acclimaterait presque. C’est bizarrement Geoffrey qui se sent le plus fébrile, mais on partage peu. Ne pas parler pour ne pas réveiller sa peur…
Nous parcourons d’abord 800 mètres, à plat, sans dénivelé aucun. Nous croisons quelques mineurs qui poussent des wagonnets (chacun contient une tonne de minerai). Le corridor est pour l’instant assez large. Willy salue chaque mineur. Il les connaît tous. Et offre ici un soda, là une poignée de feuilles de coca. Mais on évite de les déranger, surtout.


Puis nous bifurquons sur la droite. Willy veut nous montrer une faille dans la roche, là où l’on voit un filon. Il nous explique que les mineurs sont capables à l’oeil de juger de la qualité d’un filon, et de lui attribuer la bonne catégorie : 1, 2, 3 ou 4. Désormais l’argent est rare dans le Cerro. Quelques grammes par tonne tout au plus, alors qu’on pouvait en trouver jusque 700 kg (pour une tonne !) durant la période faste des Espagnols. C’est surtout le zinc et le plomb que l’on exploite aujourd’hui. Une fois trié en surface, le minerai est analysé véritablement et revendu à des acheteurs. Et finalement, ce sont eux qui tirent véritablement profit de la mine…

Au fond du tunnel, un cul de sac, et surtout, une horrible “marionnette” en papier mâché, avec à ses pieds des capsules et bouteilles de bière, et des petites fioles d’alcool. C’est El Tio. Le Diable, le protecteur de la mine. Chaque coopérative a le sien. Et ici, en fin de semaine, les mineurs se retrouvent pour lui faire des offrandes, et boire un coup “avec lui”. Pendant que nous avons nous-mêmes pris place autour du Tio, on entend une énorme déflagration. Eden se blottit contre moi… qui ne suis pas bien fière. Willy rit de nous. “Aucun danger, c’était loin”. Ha bon ? On n’aurait pas cru, comme ça…


Nous poursuivons notre avancée dans la mine. Avant de nous engager dans le tunnel suivant, Willy nous demande si on veut bien tous continuer. On n’en mène pas large, mais on poursuit tous. Le tunnel est désormais bien plus étroit. Nous devons nous coller aux parois lorsque les mineurs passent avec de petites brouettes.
Nous finissons par grimper à une (très) vieille échelle… à laquelle il manque un barreau. En haut, il faut prendre appui sur une planche posée “dans le vide”, puis littéralement faire de l’escalade. Je ne sais comment Eden parvient à se hisser, et crains le pire pour la redescente. Nous sommes maintenant courbés dans les tunnels. Il fait de plus en plus chaud, et l’air est de plus en plus difficile à respirer. Willy nous explique le rôle d’un jeune mineur, en charge de ventiler ses collègues, assis dans un espèce de seau dans ce qui s’apparente à un puit… Niveau de sécurité … Quelle sécurité ? L’émotion commence à me submerger. Les conditions sont vraiment inhumaines…Nous faisons demi-tour, et je suis étrangement calme pour guider ma fille avec son petit mètre 40 et ses bottes 4 fois trop grandes sur le chemin retour. “Tu te laisses glisser, tu sautes, tu mets son pied “là”, tu n’oublie pas qu’il manque un barreau…”. Finalement, on a de la ressource, et Eden passe comme une chef ! Bravo ma fille !


Le reste de la visite est beaucoup plus détendue, après ça. Willy nous explique la fierté des mineurs. Ici on l’est de génération en génération sans se poser de question. Et on est courageux, car “un mineur, c’est courageux”, ce n’est pas une question de caractère ou de choix. Mais aujourd’hui, avec l’effondrement des cours, certains jeunes quittent Potosi, pour trouver du travail ailleurs, abandonnant leurs pères et mères, bien tristes. Un crève coeur pour Willy qui a pourtant lui-même arrêté le métier.
Retour à la surface. Le soleil nous éblouit comme jamais. Eden qui a vaincu sa claustrophobie m’annonce qu’elle « n’aura plus jamais peur d’aller aux toilettes” (son idée fixe de rester enfermée…). Les enfants sont magiques !
Merci Willy pour cette visite et pour nous avoir fait partager la vie d’un mineur. Aucun de nous trois n’oubliera jamais je pense.




Nous retournons en ville et nous offrons un mate de coca pour nous remettre de nos émotions. Puis nous nous dirigeons vers la plaza 6 de Agosto, attenante à la plaza 10 de noviembre, avec ses jolies arcades du XIXeme siècle et son théâtre. Etrange de retrouver tant de beautés après la noirceur du Cerro Rico. Nous passons dans de jolies petites rues bien animées. Et nous décidons pour un déjeuner traditionnel au restaurant. Toujours pas de touristes mais un menu du jour à un prix imbattable : 15 pesos (soit un peu plus de 2 Euros) pour entrée, plat, dessert et boisson. Extra !



Après déjeuner nous nous dirigeons vers le marché, mais ce n’est plus la bonne heure et la plupart des stands sont fermés. Nous passons devant l’Eglise San Lorenzo. Impossible de ne pas s’arrêter. Allez, on visite ! Visite guidée obligatoire. La dame qui nous vend les billets sera aussi notre guide. Elle met son bébé “en écharpe”, dans un grand carré de tissus, sur le dos. Etrange pratique pour les Occidentaux que nous sommes mais visiblement confortable pour un tout petit.
La guide est prête pour nous expliquer la façade, splendide, du bâtiment, et nous introduit sur l’art “Baroco Mestizo” : le baroque andin, encore appelé art métis ou art indigène. Et la façade en est l’un des plus beaux exemples, mêlant symboles chrétiens, et toute la mythologie Inca : Sirènes, lune, soleil, femmes aux seins nus ou aux jupes en plumes…Les Espagnols avaient décidé de faire travailler des artistes Indiens pour convertir plus facilement les populations locales. A l’intérieur, on retrouve les saints les plus importantes de la ville, Saint Barthelemy, patron de la ville, et San Lorenzo, mais aussi Sainte Cécile entre autres.


L’église de San Lorenzo fut la première cathédrale de la ville, et lorsque l’on construisit la nouvelle, elle devint la paroisse des indigènes.
Avant de sortir, nous montons en haut du campanile. Vue magnifique sur la ville et le Cerro Rico, que je préfère désormais à distance…

Puis nous nous dirigeons vers le couvent Santa Teresa, couvent de carmélites, ce qui nous offre une petite balade bien sympathique dans la ville. Sur une placette, des enfants jouent en plein air sur un baby foot hors d’âge. Marrant tiens…
On nous annonce 1H30 de visite. Et en prime notre guide, Lydia, parle Français et se prend d’une passion pour notre fille ! Il faut dire que je ne sais pas pourquoi, mais elle est extrêmement concentrée et intéressée par la vie des religieuses de l’ordre bien rigoriste des Carmélites, Eden. Un peu choquée, sûrement, par toutes ces histoires que nous conte la guide, intarissable : Ici étaient placées les deuxièmes filles des plus riches familles aristocratiques d’Europe, et les places pour rentrer étaient chères, très chères. C’était un honneur absolu que de pouvoir envoyer sa fille au couvent, et de s’acquitter par la même occasion de la dot (l’équivalent de 90 000 Euros d’aujourd’hui) pour ne la revoir jamais : une carmélite rentrait au couvent à 15 ans et n’en ressortait jamais, ceci jusqu’au Concile Vatican II, en 1962. Même au parloir, les religieuses ne pouvaient être vues, pas même de leurs parents. Elles avaient le droit de parler uniquement en travaillant, et ceci durant 2 heures par jour, une récréation bien sage…. La journée était par ailleurs rythmée par 7 messes, rien que ça !
Le couvent comptait alors 21 religieuses, et il n’était possible de rentrer que si l’une décédait. Encore aujourd’hui le couvent est habité par 6 religieuses. D’ailleurs l’une d’entre elles, qui a une formation d’architecte, est celle qui a mené les travaux pour rénover ce lieux magnifique.


Lydia nous raconte tout ceci en nous menant au travers d’un dédale de pièces où nous découvrons le travail des religieuses, broderie, ou fabrication d’osties. Elle vendent encore aujourd’hui des petits gâteaux et des confitures de leurs productions. Dans le cloître, nous découvrons les plantes médicinales qu’elles cultivent, nous passons par les cuisines, le réfectoire, la salle qui servait d’infirmerie, et celle des châtiments corporels qu’elles s’auto-infligeaient (effrayant. Là, on a perdu Eden, impossible de lui faire comprendre que ces dames pouvaient “se faire du mal pour le salut de leur âme”, elle bugge).







Nous pénétrons bientôt dans l’ossuaire, où l’on retrouve les caveaux de toutes les religieuses décédées ici (forcément, on ne sortait JAMAIS), et qui servait aussi d’endroit où elles écoutaient la messe (7 fois par jour donc !), séparées de l’église par un rideau. Elles ne risquaient pas d’oublier comment elles allaient finir…De l’autre côté du rideau, une magnifique église, dont le plafond à caissons de l’époque coloniale est somptueux. Lydia n’est pas peu fière. Il n’a même jamais été restauré ! Nouveau dédale de pièces, dont les murs sont tous richement décorés de peintures de la plus grande qualité (forcément, les dots de 90 000 euros se payaient souvent “en nature”). On est quand même un peu étonnés de ce père ayant payé une partie de la dot de sa fille avec des miroirs. Etrange dans un lieu aussi pieux… et le péché d’orgueil alors ?



Lydia continuerait bien à nous faire découvrir les moindres recoins et anecdotes de “son” couvent, mais nous sommes déjà là depuis 3 heures. Je crois qu’Eden a acquis plus de culture religieuse ces 3 dernières heures qu’au cours de toute sa vie. Il est temps de sortir…
Après une telle journée, nous rentrons directement à l’hôtel où nous dînons à peine. On est… épuisés par les émotions de la journée.
Le 17 Mai est notre dernier jour à Potosi, mais vu la journée de la veille, on reste calme, et profitons une nouvelle fois de notre beau roof top. Nous retournons déjeuner au même petit restaurant bon marché que la veille. Il nous reste un peu de temps pour visiter la cathédrale. Une nouvelle fois, on ne peut y avoir accès qu’avec une visite guidée. Hum.. on a eu notre quota hier. Nous laissons tomber et préférons flâner un peu dans les jolies rues autour de la plaza 10 de Noviembre. Et puis il est vite temps de retourner à l’hôtel prendre nos bagages : cet après-midi, nous prenons le bus pour Sucre.

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2 réflexions sur « Bolivie : Potosi, la ville de l’argent, entre faste et misère… »